Le 24 novembre dernier a été organisée une commémoration en hommage aux 27 personnes mortes dans la Manche, ainsi qu’aux quatre personnes dont le corps n’a jamais été retrouvé le 24 novembre 2021. La commémoration s’est déroulée à Dunkerque, (lieu de départ du zodiac ayant fait naufrage) sur la Place de l’hôtel de ville.
Le journaliste indépendant et militant Maël Galisson ouvre le temps de parole, sous les rafales de vents et derrière les deux banderoles où on peut lire « Vos frontière nos mort·es » et « Morts aux frontières. Etats coupables ».
« Ah bah t’entends pas, tu seras pas sauvé »
Maël rappelle les faits, comment les personnes ont tenté d’alerter à de nombreuses reprises le Cross Gris-Nez qui coordonne les opérations de secours côté français. Cette nuit-là, l’équipe du Cross n’aurait jamais lancé d’opération de sauvetage.
« (…) Est-ce encore permis de rappeler qu’à 4h16, le Cross est même allé jusqu’à dissuader un tanker – un navire commercial- d’intervenir pour secourir les personnes en train de se noyer ? Faut-il encore rappeler les propos d’un cynisme terrifiant d’une opératrice du Cross qui, en réponse à l’appel d’un des naufragé·es,a prononcé cette phrase : « Ah bah t’entends pas, tu seras pas sauvé ». (…) ». La suite à retrouver juste ici.
Pourquoi parlons-nous de barbarie ?
La parole est ensuite donnée à Michel Rousseau de l’association Tous Migrants de Briançon, qui insiste sur le terme de « barbare », caractérisant les politiques migratoires menées aux frontières françaises.
« Parce que tendre des guets-apens et traquer les personnes exilées dans la montagne comme des bêtes sauvages et dangereuses, c’est de la barbarie.
Contraindre ces personnes à survivre dans la rue et dans les terrains vagues dans le dénuement le plus complet, leur refuser d’accéder à un toit et même à l’eau potable, comme c’est le cas à Briançon, à Paris et à Calais, c’est de la barbarie.
Refouler systématiquement les personnes, parfois en les humiliant, déchirer leurs papiers et leurs maigres affaires, démanteler les campements de fortune en permanence, c’est de la barbarie.
Cette politique barbare qui tente de déshumaniser les personnes exilées alimente la xénophobie et le racisme et constitue, comme l’histoire l’a trop souvent montré, un préalable aux pires exactions, depuis les ratonnades jusqu’aux génocides.
Cette politique barbare est aussi favorisée par un discours insidieux, du genre « on ne peut pas accueillir toute la misère du monde », comme si ces personnes qui fuient la misère étaient cette misère. » Intégralité du texte à retrouver juste ici.
La mort jusqu’au pays basque
Les interventions se poursuivent, Marie Crespel de la Fédération ETORKINEKIN-DIAKITE, venue tout droit des pays basque nous raconte comment à la frontière entre le Pays Basque Nord et Sud, plusieurs associations se sont mobilisées pour soutenir les personnes exilées.
9 personnes ont trouvé la mort depuis 2021
« La Bidasoa, c’est la rivière qui sépare nos frontières. Autour de La Bidasoa, 9 personnes ont trouvé la mort depuis 2021. Fermin MUGURUZA leur a rendu hommage dans son film qui sort actuellement : “Bidasoa 2018-2023”
Retrouvez la prise de parole de Marie Crespel, juste ici.
De l’autre côté de la Manche
La coordinatrice du Crossborder forum, Francesca Humi, fermera ce temps, en annonçant qu’une autre commémoration avait lieu simultanément en Angleterre.
Une marche silencieuse se poursuivit pendant une quinzaine de minutes jusqu’au square Turenne, où l’on a pu écouter l’artiste calaisienne Loup Blaster chanter sa nouvelle chanson à capella, Je suis le Feu.
« J’ai perdu ma grande sœur Kajal et ses trois enfants la nuit du 23 novembre. »
Nous écoutons ensuite la lettre poignante de Mohammad Kalari, frère de Kajal et oncle des trois enfants de sa soeur ayant perdu la vie la nuit du 23 et 24 novembre 2021.
La commémoration se termina aux alentours de 21h sous un texte et une musique de Jacques Yvart et Anonyme, évoquant la tragédie intervenue le 24 novembre 2021 – On n’oublie pas – Un repas chaud a également été servi par la cantine de Calais.*
*Cantine : Les cantines auto-gérées représentent une réponse populaire à la thématique centrale de l’alimentation. L’objectif est de pouvoir alimenter gratuitement ou à prix libre la population. Elles approvisionnent en nourriture des espaces politiques et/ou de luttes. Pour en savoir plus, cliquez-ici.
Une marche avait déjà été organisée un an après :
Montage vidéo : Pierre Muys
Reportage : Jade Lamalchi