Retour sur l’hommage rendu hier aux deux personnes décédées en mer, entre Hardelot et Equihen-Plage mercredi matin. Malgré la répétition de ce rituel ces dernières semaines, plus d’une centaine de personnes ont souhaité rendre hommage à ses nouvelles vies supprimées par les politiques frontalières menées ici.
Reportage : Julia Druelle et Pierre Muys.
MOT POUR MOT
« Nous ne voulons pas seulement compter les morts. Nous voulons une minute de silence pour leur vie. Nous voudrions honorer leur vie, leur histoire. À Calais comme sur tout le littoral la seule politique est celle de l’invisibilisation, de la marginalisation, de vies désignées comme ne mérite pas d’être vécue. C’est une politique de destruction de tout lieu de vie, d’identification et de mémoire. Aujourd’hui comme hier, nous voulons honorer et commémorer ces morts, ces morts de trop. Nous voulons faire place à leur mémoire, prendre de l’espace et faire une place à leur histoire.«
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« Comme vous sans doute, je crois en la force des symboles. Le lieu de mémoire officiel. Il est quelques dizaines de mètres sur votre droite. Tant que nous faisons mémoire des personnes qui sont victimes de la frontière ici, nous laissons croire que ça n’a rien à voir avec ceux qui sont morts pour des problèmes de frontières. J’ose espérer que la prochaine fois que nous nous retrouverons et bien nous ferons le cercle de silence là bas. Il n’y a pas deux histoires, une histoire marginale que nous célébrons ici et puis l’histoire officielle qui est là bas. C’est important de croire, de faire croire qu’il s’agit bien d’une seule histoire et que ici, c’est bien l’avenir de la France qui se joue à travers ceux qui sont victimes de la frontière.«
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« Ma première commémoration c’était ici, il y a huit ans.
La première commémoration ici, c’était il y a huit ans.
C’était dans un contexte semblable où les personnes tuées par les politiques de frontières se succédaient sans que l’on ait l’énergie ou qu’on y dédie l’énergie que chaque personne individuellement méritait. Ce n’était pas un acte de rassemblement pour pleurer, ce n’était pas pour être en silence. C’était bien pour le contraire, pour gueuler qu’on en avait marre que ce soit dans les faits divers des journaux, qu’on en avait marre que ce soit dans les jungles, que ce soit dans nos têtes. C’était un acte de reprise de l’espace public et ça l’est encore aujourd’hui, huit ans après. Car malheureusement, les politiques frontalières qui tuaient des gens il y a huit ans sont toujours les mêmes, elle tuait des gens avant, et aujourd’hui à nouveau, on voit un enchaînement de personnes qui décèdent sans aucune autre raison que nos politiques de visas.
Je tenais à dire aussi que c’est très bien qu’on y soit encore, nous les vivants et qu’il y aient encore des personnes pour lutter pour les personnes tant qu’elles sont vivantes, puisque c’est le meilleur moyen pour éviter les prochaines décès. Et nique les frontières, quand même ! »