Un rassemblement en soutien aux Soulèvements de la Terre

Répondant à un appel national, un rassemblement citoyen avait lieu devant la sous-préfecture de Calais, mercredi 28 juin, pour dénoncer la dissolution des Soulèvements de la Terre (LSDLT) et apporter un soutien aux quinze militants inculpés suite à la manifestation de Sainte-Soline ainsi qu’au sabotage de l’usine Lafarge.

Mercredi soir, Calaisiennes et Calaisiens se sont réunis autour d’un mégaphone pour faire résonner leur parole sur l’espace public, devant les grilles fermées de la sous-préfecture, gardée par la police – Les prises de parole complètes sont à retrouver en fin d’article.

Sandra Moreau, professeure de philosophie à Calais, inaugure cette prise de parole par une remise en contexte, avant de faire la lecture d’un communiqué rédigé par LSDLT : « Dans une inversion ahurissante, celles et ceux qui cherchent à assurer la possibilité d’une vie digne pour les générations présentes et futures sont traitées en terroristes par celles et ceux-là mêmes qui compromettent quotidiennement la possibilité d’une telle vie. »

Sandra, professeur de philosophie à Calais.

Jean-Pierre Moussally, élu municipal écologiste, a de son côté abordé longuement la systématisation de la violence policière lors des mobilisations sociales et écologistes, ainsi que l’impossibilité récurrente pour les secours de pouvoir accéder aux manifestant.es blessé.es. « C’est quelque chose que j’ai déjà vécu lorsque j’étais à Notre-Dame-des-Landes » explique-t-il. « J’ai assisté moi-même les médecins de campagne sur place. Il y a des médecins qui ont même apporté des blessés avec leur véhicule personnel à l’hôpital puisque les secours ne venaient pas » décrit l’élu écologiste.

Poursuivant sur la thématique des violences policières, l’élu d’opposition revient sur la mort de Nahel, survenue la veille à Nanterre, « exécuté par un policier pour un refus d’obtempérer », considérant que malgré les faits reprochés au jeune homme rien ne permet à un fonctionnaire de tirer sur un citoyen « à bout portant ».

Jean-Pierre Moussally, élu municipal et communautaire (EELV).

Jean-Paul Rozanès, militant LFI-NUPES du coin, prend le micro à son tour pour se faire porte-voix de La France Insoumise et de Jean-Luc Mélenchon. « Ainsi, ce sont plus de trente associations qui ont été dissoutes par ce gouvernement depuis l’élection d’Emmanuel Macron. Le gouvernement confirme la voie liberticide dans laquelle il est engagé » dénonce-t-il, avant de fustiger la Cinquième République et de plaider pour une nouvelle république, réellement démocratique.

« Quel que soient les délits qui peuvent être commis, rien n’autorise un policier à exécuter la peine de mort » poursuit le militant, au moment de rendre hommage à Nahel, tué la veille. La solution ? « Je crois qu’il faut un autre gouvernement, parce qu’il n’y a rien à attendre de ce gouvernement pour qu’on ait une vraie police qui protège la population » conclut-il.

Jean-Paul Rozanès, militant LFI-NUPES.

Olivier Carraud, professeur d’anglais et militant Lutte Ouvrière – et syndicalement très actif avec la SNES-FSU au moment de la réforme des retraites – revient quant à lui sur la notion d’écoterrorisme élaborée par le gouvernement. « Lafarge avait été condamné quand même pour une petite histoire avec Daesh en Syrie » rappelle-t-il, évoquant la condamnation par les Etats-Unis du cimentier Lafarge, qui avait collaboré en Syrie avec le groupe État Islamique et même financé ses actions terroristes en 2013-2014. « Donc quand on traite les gens de terroristes, il faut voir qui on traite d’abord » lance-t-il, alors que des militants écolos ont été arrêtés début juin par l’anti-terrorisme, accusés de dégradations dans une cimenterie Lafarge.

« Chaque mouvement social, ce sera de plus en plus dur et il faut se préparer à ce qu’il y ait ces répressions, ces moments difficiles » met en garde le militant LO, appelant à se préparer, à s’organiser et à conserver l’unité précieuse des travailleurs et travailleuses du pays, acquise par le mouvement contre la réforme des retraites. Répondant à Jean-Paul Rozanès qui l’avait précédé, il conclut : « Alors moi, je ne pense pas qu’il faudra un autre gouvernement pour changer ça. Moi, je pense que pour régler les problèmes sociaux et écologiques, la seule chose à faire, c’est renverser le capitalisme. » Applaudissements.

Olivier Carraud, professeur d’anglais et militant chez Lutte Ouvrière.

Vient alors le tour d’Aude Schneider de se saisir du mégaphone, elle dont le frère Loïc est emprisonné depuis une semaine pour avoir participé à la manifestation du 25 mars à Sainte-Soline – nous avons réalisé avec elle un riche entretien revenant sur le parcours de son frère, et l’acharnement étatique dont il fait l’objet. Le maraîcher risque jusqu’à sept ans de prison. La justice persiste et le maintient actuellement en détention à la prison de Niort, en attendant son procès qui aura lieu à partir du 27 juillet, à Poitiers.

Avec une émotion qu’elle tente de contenir, Aude raconte son frère, « pour vraiment détacher cette image d’éco-terroriste qu’on lui colle. C’est quelqu’un de très humain. Il plante des carottes et des choux à longueur de journée dans la Meuse. Il travaille auprès des personnes âgées. Il a juste une soif de justice, un désir de regrouper les gens, d’aimer les gens, de montrer qu’il y a quelque chose qui ne va pas en France et dans le monde, qu’on nous écrase » raconte-t-elle.

Aude Schneider.

Le rassemblement se termine avec la prise de parole de Pauline, amie de Loïc. « J’ai vu quelqu’un qui était d’une empathie bouleversante, voire à la limite, parfois même un peu chiant. On va le dire, quand même. Voilà, il est assoiffé de voir un monde en paix. Et c’est sa lutte à lui. » raconte-t-elle, avant de lire un texte de son ami. « Je ne suis d’aucun parti, si ce n’est celui de la vie. Je suis partisan de ce souffle qui anime chaque être vivant, ce souffle qui vous donne des frissons, ce chant de la liberté. Et c’est parce que j’ai pour amour la liberté, dont la mienne est l’épouse de toutes les autres, que je suis anarchiste. » entend-on devant la sous-préfecture de Calais.


Les prises de parole

Sandra Moreau
Professeur de philosophie

« Le 21 juin, en conseil des ministres, le gouvernement a enclenché une procédure de dissolution des Soulèvements de la Terre. Cette dissolution contre un mouvement qui entend lutter contre l’accaparement des terres, de l’eau et de tout ce qui devrait être considéré et traité comme un bien commun s’est accompagnée de l’arrestation brutale et du placement en garde à vue de nombreuses personnes pour la participation supposée à l’action contre la cimenterie Lafarge de Bouc-Bel-Air et à la manifestation du 25 mars à Sainte-Soline. Dans une inversion ahurissante, celles et ceux qui cherchent à assurer la possibilité d’une vie digne pour les générations présentes et futures sont traitées en terroristes par celles et ceux-là mêmes qui compromettent quotidiennement la possibilité d’une telle vie.

C’est pourquoi Les Soulèvements de la Terre, administrativement dissous mais toujours vivants à travers 180 comités locaux, appellent à des rassemblements de soutien partout en France, et aujourd’hui en particulier, alors que plusieurs personnes sont convoquées à la gendarmerie en raison de leur implication dans le mouvement d’opposition aux mégas bassines. Comme le souligne dans un entretien à Calais La Sociale (je fais un peu de pub du coup) Aude Schneider, la sœur de Loïc, agent de service hospitalier de 28 ans, maraîcher, poète et activiste écologiste, aujourd’hui incarcéré en détention provisoire : “Plus on se mobilise, plus on parle de cette répression, plus on la conteste et plus on a de chances de peser sur les décisions de justice”. »


Jean-Pierre Moussally
Élu municipal et communautaire (EELV)

« Donc moi je suis Jean-Pierre Moussally. Je suis élu municipal et communautaire de Calais et Grand Calais Terres et Mers. Je suis aux côtés des manifestants dans cette manifestation de soutien à des mouvements de luttes écologistes. Je ne vais pas répéter ce qui a déjà été très bien dit par la personne précédente au nom des Soulèvements de la Terre. Mais peut-être partager avec vous un constat, en tout cas une impression assez troublante, assez dérangeante. C’est celle d’une dérive du pouvoir et des forces de l’ordre qui va vers une répression de plus en plus violente.

On s’inquiète tous évidemment de la manière dont les Gilets jaunes ont été traités. À Sainte-Soline, une mobilisation massive pour défendre un endroit où rien ne pouvait être détruit, c’est-à-dire un trou, 4000 grenades lacrymogènes utilisées, les violences de part et d’autre. C’est vrai, mais quand même. Deux manifestants en urgence vitale qui n’ont pas pu être secourus rapidement et en raison de l’indication qui avait été donnée par les forces de l’ordre pour dissuader les secours d’intervenir.

Alors ça, c’est quelque chose que j’ai déjà vécu lorsque j’étais à Notre-Dame-des-Landes par exemple, où effectivement, on a eu des manifestations assez brutales à l’époque. Donc sur sur les lieux et effectivement les sauveteurs, les pompiers n’ont pas eu l’autorisation de venir secourir des personnes qui étaient blessées et où j’ai assisté moi-même les médecins de campagne sur place. Il y a des médecins qui ont même apporté des blessés avec leur véhicule personnel à l’hôpital puisque les secours ne venaient pas. Ce n’est pas quelque chose qui est nouveau et isolé.

En mon nom propre, évidemment, je condamne toutes formes de violence. Mais je peux comprendre des personnes qui, devant l’inaction, devant l’emballement du dérèglement climatique, de sa gravité, puissent se dire : “On a essayé toutes les voies légales, ça ne marche pas”, et qui finalement sont amenées à mener des actions qui sortent de la légalité. Donc on a une dissolution des Soulèvements de la Terre par un gouvernement quand même condamné pour inaction climatique, il faut quand même le noter.

Parallèlement, on a d’autres dérives, je dirais autoritaires et inquiétantes pour la liberté d’expression, pour l’État de droit. On a Anticor, l’association Anticor qui lutte contre la corruption, qui vient de perdre son agrément anti-corruption. Alors qu’une affaire Alexis Kohler est en cours et a été dénoncée par Anticor. Et on a bien sûr le fait grave qui a été relaté hier, à savoir le jeune Nahel qui a été exécuté par un policier pour un refus d’obtempérer. Avec un policier, son collègue et la procureur qui mentent parce que l’événement a été filmé et dément la version des policiers. Et sur cette vidéo, on entend quand même des paroles gravissimes : “Tu vas prendre une balle dans la tête.” Ce sont des mots qui ont été prononcés lors de cette altercation et quelque puisse être la responsabilité ou les faits reprochés à ce jeune, jamais de la vie, ça ne mériterait qu’on lui applique, qu’on lui tire une balle à bout portant et qu’on le tue. »


Jean-Paul Rozanès
Militant pour La France Insoumise et la NUPES

« Je voudrais juste rappeler que le gouvernement a enclenché la procédure de dissolution le 21 juin, après avoir arrêté quinze militants à leur domicile, qu’il a placé en garde à vue. Immédiatement, La France Insoumise, Jean-Luc Mélenchon et tous les responsables ont condamné ces arrestations et cette dissolution.

L’annonce de cette dissolution s’ajoute à la liste déjà bien longue d’atteintes aux libertés publiques, à laquelle il faut maintenant également ajouter l’annulation de l’agrément de l’association Anticor. Ainsi, ce sont plus de trente associations qui ont été dissoutes par ce gouvernement depuis l’élection d’Emmanuel Macron. Le gouvernement confirme la voie liberticide dans laquelle il est engagé. Un gouvernement minoritaire dans le pays qui, appuyé sur le pouvoir exorbitant que lui donnent les institutions de la cinquième République, voudrait imposer par la force sa politique.

C’est la raison pour laquelle La France Insoumise combat : pour en finir avec ce gouvernement, pour chasser Macron, pour une majorité de la Nupes avec les organisations qui l’ont rejointe lors des élections législatives, et pour en finir avec cette Cinquième République, pour une assemblée constituante, pour une nouvelle République qui soit enfin vraiment démocratique, à l’opposé de ce qu’est cette cette Cinquième République.

La France Insoumise et ses militants ont également condamné immédiatement, Jean-Luc Mélenchon en tête, l’assassinat du Nahel par un policier. Quel que soient les délits qui peuvent être commis, rien n’autorise un policier à exécuter la peine de mort. La peine de mort est abolie en France et les policiers doivent être là pour protéger la population et non pour tirer dessus. Il y a donc un problème grave au niveau de la police en France et il est temps que des mesures soient prises. Et pour ça, je crois qu’il faut un autre gouvernement parce qu’il n’y a rien à attendre de ce gouvernement pour qu’on ait une vraie police qui protège la population et non une police qui leur tire dessus. Comme malheureusement ça arrive de plus en plus souvent, aussi bien lors des manifestations comme ça a été le cas avec la manifestation des Soulèvements de la Terre que lors d’arrestations dans les banlieues. »


Olivier Carraud
Militant pour Lutte ouvrière

« Olivier pour Lutte Ouvrière. Globalement, on est tout à fait d’accord avec tout ce qui a été dit et ce soutien aux militants écologistes et aux Soulèvements de la terre. Pour rappel, Lafarge avait été condamné quand même pour une petite histoire avec Daesh en Syrie. Donc quand on traite les gens de terroristes, il faut voir qui on traite d’abord, voilà.

Tout ça c’est quand même en ce moment, cet État, ce gouvernement est de plus en plus autoritaire. Faut pas non plus oublier ce qui se passe depuis le mois de janvier les manifs du mouvement des retraites. Il y a eu une mobilisation, il y a une contestation. Eux, ils savent serrer les rangs et ils serrent les rangs en nous tapant dessus. Nous aussi faudra qu’on réfléchisse à s’organiser, à se défendre. Parce que la difficulté, elle, va continuer. Il ne faut pas croire que ça va être fini. Là, c’est… chaque mouvements social, on est dans une période de crise, chaque mouvement social, ce sera de plus en plus dur et il faut se préparer à ce qu’il y ait ces répressions, ces moments difficiles. Il faut qu’on conserve l’unité de tous les travailleurs qu’on a eu dans cette manif, dans ces manifs, faut qu’on conserve cette unité là. Ça, c’est précieux, ça nous servira pour l’avenir. Alors moi, je ne pense pas qu’il faudra un autre gouvernement pour changer ça. Moi, je pense que pour régler les problèmes sociaux et écologiques, la seule chose à faire, c’est renverser le capitalisme. Voilà, merci à vous et bon courage. »


Aude Schneider
Sœur de Loïc, emprisonné depuis quelques jours

« Donc je suis la petite sœur de Loïc Schneider, qui est incarcéré actuellement à Poitiers pour avoir participé à plusieurs manifestations à Sainte-Soline. Et donc il est accusé d’avoir été présent lors de la manifestation du 25 mars. Je ne ne vais pas beaucoup m’exprimer parce que j’ai pas vraiment préparé. Il y a déjà quelque chose qui est sorti sur Calais La Sociale. Vous pouvez lire sur ça, ça sera mieux, ce sera moins brouillé.

Je veux juste dire que c’est beau, le soutien. Vous êtes là aussi pour Les Soulèvements de la Terre, mais aussi pour les personnes qui sont incarcérées. Donc il y a plusieurs personnes qui ont été relâchées. Mais mon frère est encore emprisonné. Il a son procès le 27 juillet à Poitiers. À la base, il est de Nancy, donc ils l’ont vraiment mis loin. C’est là bas que la chose sera traitée. Donc le procès le 27 juillet. Demain, à Niort, il repasse devant le juge des libertés pour demander la liberté conditionnelle immédiate [le 29 juin, la demande de remise en liberté de Loïc a été refusée par le tribunal]. Parce que, du coup, il est en détention provisoire avant son procès, car il est considéré comme quelqu’un de dangereux et susceptible de refaire des actions.

Moi, je suis choquée des moyens mis en place pendant les interpellations, pas seulement celle-là, mon frère s’est plusieurs fois fait interpeller. Et c’est juste… c’est horrible quoi. On traite les gens comme des moins que rien. Donc oui, comme des comme des sauvages, ça c’est vraiment grave. En fait, ce qui se passe, c’est vraiment très très grave ce qui se passe. La violence… La violence est très grave.

Donc déjà, ça fait du bien de voir qu’il y a des gens. Juste dire quelques mots sur mon frère pour vraiment détacher cette image d’éco-terroriste qu’on lui colle. C’est quelqu’un de très humain. Il plante des carottes et des choux à longueur de journée dans la Meuse. Il travaille auprès des personnes âgées. Il a juste une soif de justice, un désir de regrouper les gens, d’aimer les gens, de montrer qu’il y a quelque chose qui ne va pas en France et dans le monde, qu’on nous écrase, qu’il y a une pression, qu’il y a des violences et il a juste eu le courage d’ouvrir, d’aller sur place et en fait maintenant il en paye, il paye, il paye les pots cassés de son action… Mais ça va! Il tient le coup! C’est quelqu’un de très fort qui a déjà été incarcéré car il a été au G20 contre le sommet du G20, il a participé à la manifestation. Il a déjà fait un an et quatre mois de prison. Il est fort, il s’en sort. Mais voilà, il faut lui envoyer son soutien, il n’est pas tout seul. Il y a encore une autre personne, il y a une personne qui a eu dix mois de prison ferme. Donc on en saura plus demain à Niort et puis le 27 juillet à Poitiers. Merci. Il y a un poème, un poème de Loïc qui va être lu, parce qu’il est aussi poète, il écrit des poèmes, C’est Pauline, mon amie et aussi l’amie de Loïc, qui va lire ce poème. »


Pauline
Amie de Loïc

« Bonjour ! Bon, c’est bien la première fois que je lis un poème au mégaphone, mais je dirais que la poésie fait bien partie de la lutte. Et c’est aussi comme ça qu’on s’est connu avec Loïc. (ironique) Je suis ravi de voir que celui là n’est pas en alexandrins parce qu’on s’est franchement engueulés sur le sujet. On s’est aussi engueulés sur le fait qu’il essayait de me traîner pour chercher des châtaignes tout le temps. Honnêtement, c’est la seule violence que j’ai subi de sa part. Par contre, pour le coup, j’ai vu quelqu’un qui était d’une empathie bouleversante, voire à la limite, parfois même un peu chiant. On va le dire, quand même.

Voilà, il est assoiffé de voir un monde en paix. Et c’est sa lutte à lui. Je me permettrais de lire un de ses textes, proposé aussi par Aude et dans lequel moi même, je me reconnais. »

[Elle lit le poème]
Je ne suis d’aucun parti, si ce n’est celui de la vie. Je suis partisan de ce souffle qui anime chaque être vivant, ce souffle qui vous donne des frissons, ce chant de la liberté. Et c’est parce que j’ai pour amour la liberté, dont la mienne et l’épouse de toutes les autres, que je suis anarchiste. Vous n’avez le droit d’exercer de pouvoir que sur vous-même. Pourtant, combien sommes-nous, par nos paroles ou nos actes, à exercer notre pouvoir de domination, de force, de séduction, de manipulation ou d’autoritarisme sur nos semblables ? Combattre ces vices, c’est s’attaquer à notre éducation, grande responsable de l’odieux être que nous sommes devenus. Réapprendre à être aussi intelligent que le jour de notre naissance, là où l’ouverture d’esprit est à son paroxysme. Garder cette curiosité abondante pour saisir l’apprentissage éternel qu’est la vie. Notre cursus éducatif, s’il n’est pas libertaire, conditionne notre pensée à celle des masses, nos habitudes à une norme. Et parmi tous les tourments que cette éducation ignoble nous apporte, nous nous retrouverons incontestablement sur l’échiquier de notre monde actuel à être les pions de l’exploitation du tiers monde, des esclaves serviles de l’État, de la nation où nous sommes nés. Et si la folie venait à un chef d’État de déclarer la guerre à un autre, nous serions contraints de prendre les armes ou d’apporter un soutien logistique à l’armée par nos taxes – entre parenthèses – contre notre sœur ou notre frère. Car la véritable fraternité ne s’arrête pas là où se dessine la frontière d’un pays ne trouve pas écho dans ces chansons des Patriotes, ni ne flotte sur aucun drapeau, si ce n’est le drapeau noir. Ce noir où le nom de chacun, chacune est écrit. Puissions-nous, durant notre vie, avoir l’audace de lire ces écrivains théoriciens de l’anarchie et la patience de s’y retrouver pour enfin jouir de l’espace infini qu’est la liberté.

Merci Loïc. »

Pauline (militante)
« Juste un petit mot pour les toutes les personnes qui ont été blessées, mutilées et qui se battent encore aujourd’hui pour survivre, et retrouver leurs capacités, notamment Serge, Mickael et leurs familles. « 


Film : Pierre Muys
Photos : Arthur Vleirick
Texte : Pierre Muys et Valentin De Poorter