L’élu d’opposition J-P Lannoy dépose un recours contre Natacha Bouchart

Jeudi 1er juin se tenait à la brasserie Le Calice une conférence de presse proposée par l’élu d’opposition Jean-Philippe Lannoy (LFI- NUPES). Objet du rendez-vous : l’annonce du dépôt d’un recours au tribunal du contentieux pour excès de pouvoir à l’encontre de Natacha Bouchart, maire de Calais.


Cette démarche intervient suite au refus d’intégrer à l’ordre du jour du conseil municipal du 28 mars 2023 un vœu de soutien émis par l’élu en solidarité aux salarié.es de l’usine Meccano, bientôt licencié.es.


L’élu confie avoir constitué ce recours pour deux raisons : l’une juridique, l’autre symbolique.


Juridique quant à la forme qu’a pris ce refus. Effectivement, celui-ci ne semble selon lui pas légal. Jean-Philippe Lannoy avait envoyé cette proposition de vœu trois jours avant le conseil municipal sachant que dans le règlement intérieur, rien n’est stipulé par rapport à un quelconque délai d’envoi. Seule réponse reçue : le maire étant maître de l’ordre du jour, le vœu n’y apparaîtra pas. Natacha Bouchart parlera néanmoins de l’usine Meccano lors du conseil en son seul nom.


 » Elle veut s’attirer les lauriers, comme elle le fait toujours. Elle ne veut surtout pas que ce soit le conseil municipal dans son ensemble qui s’exprime et encore moins un conseiller d’opposition. Je trouve ça logique qu’un conseil municipal dans sa totalité émette un soutien aux salariés. C’est un message adressé aux cinquante-et-un salariés que les quarante-neuf élus du conseils municipal se sont prononcés en soutien. Là, ce qu’on a actuellement, c’est Natacha Bouchart, seule avec cette vision totalement verticale du pouvoir. « 


Le conseiller n’en est pas resté là. il a, comme le règlement du conseil municipal l’y autorise, fait une réclamation dès le début de la séance afin de faire savoir son mécontentement de ne pas avoir pu mettre à l’ordre du jour le vœu en question. Selon le code général des collectivités territoriales article L. 2121-29,  il est dit que « le conseil municipal émet des vœux sur tous les objets d’intérêt local ».


Directement, son micro est coupé et sa parole avec. Il écope d’un rappel au règlement avec en supplément une attaque personnelle de la part de Natacha Bouchart « Je sais bien que la journée est chaude, je sais bien que tout le monde est bien chaud chez les LFI« .
Cerise sur le gâteau, un mensonge de la part de l’édile affirmant que les vœux ne seraient pas autorisés : « je suis le maître de l’ordre du jour et il n’est pas inscrit à l’ordre du jour. » ajoutera-t-elle. Nouveau manquement au règlement de la part de la maire d’après Jean-Phillippe Lannoy car toujours selon l’article 14 du code général des collectivités territoriales : « Le maire fait approuver le procès verbal de la séance précédente et prend note des rectifications éventuelles. Le maire accorde immédiatement la parole en cas de réclamation concernant l’ordre du jour ».

Est-ce donc au seul et bon vouloir de Natacha Bouchart de déterminer si les points sont inscrits ou non à cet ordre du jour ? Est-ce le maire qui de façon arbitraire, décide de ce qui s’exprime ou non au sein de d’une instance locale et démocratique? On peut se poser la question, d’autant plus qu’une réglementation officielle existe pour faire exister la démocratie au sein des conseils municipaux.
« De façon ubuesque, c’est moi qui me prend un rappel au règlement à deux reprises » ajoute Jean-Philippe Lannoy.
A savoir que ce n’est pas la première fois qu’un vœu proposé par les conseillers d’opposition se voit refusé de la même manière. C’est le mois précédent, en février 2023, qu’un voeu concernant le mouvement contre la réforme des retraites fut retoqué. On avait répondu que cette question-là n’était pas d’intérêt local alors que dans d’autres conseils municipaux de France, cela avait pu être fait car cette réforme concernait l’ensemble des Français.

Ce recours s’inscrit dans une démarche également symbolique. L’élu de gauche tentera de marquer un coup d’arrêt au comportement de mépris et aux attaques personnelles émises par l’équipe municipale à l’encontre de tous les conseillers municipaux d’opposition.
En effet, ils ne bénéficient que de très peu d’outils pour exercer à bien leur mandat. Pour exemple, les documents inhérents aux débats ne sont presque jamais envoyés aux élus tandis qu’on leur demande en même temps de voter des propositions concernant les sujets concernés.

« On ne nous donne jamais les documents avant, on arrive en commission, on les a sur table. Parfois, on a trois lignes sur un sujet extrêmement complexe. Quand on demande où sont les documents, on nous répond qu’on les aura lors du conseil. Sans cesse, on a des bâtons dans les roues. « 

Par ce recours, il est aussi question pour l’élu d’évoquer la propension au mensonge de la mairie LR. Des contrevérités énoncées trop souvent lors de chaque conseils municipaux. Jean-Philippe Lannoy donne ici en exemple : le sujet des retombées économiques du dragon sur le Calaisis. L’étude financière n’avait pas été transmise ni en amont ni lors de la séance. Une réaction avait par ailleurs été demandée à l’opposition qui avait rétorqué  la complexité de communiquer sur ce sujet sans pouvoir disposer de quelconques informations complémentaires au power point parcellaire de l’étude d’impact projetée lors du conseil municipal. Ce à quoi, Natacha Bouchart aurait répondu qu’elle non plus n’avait pas eu à sa connaissance les études de retombées économiques. « C’est un mensonge parce que quelques mois auparavant, lors du conseil d’administration (de la compagnie du dragon), j’ai reçu le rapport d’activité d’exercice 2022, le 13 avril 2023, avec un édito de Natacha Bouchart parlant de 15 millions de retombées économiques. Elle ne peut pas venir après en conseil municipal dire qu’elle n’a pas eu l’étude avant nous alors que dans cet édito, elle parle de ces mêmes retombées économiques.« 
L’élu va plus loin : « si on creuse, il y en a à chaque conseil. À chaque conseil, ce sont des mensonges, du mépris. A chaque fois qu’on (les élus d’opposition) va faire une remarque, elle va nous attaquer sur nous, sur le fait que ce soit elle qui ait gagné, sur le fait que nous ne pensons pas comme si où comme ça… Ou en permanence, elle va nous refaire dire des choses qu’on n’a pas dites. « 

L’élu explique par ailleurs que depuis la fin de l’année 2021, tous les élus d’opposition ont été « bannis » des inaugurations. Ils ne reçoivent plus que celles concernant les événements patriotiques. Jean-Philippe Lannoy n’a, à ce jour, reçu aucune réponse de la part de la mairie sur les raisons d’une telle mise à l’écart. Cherche-t-elle par ce geste à invisibiliser l’opposition politique calaisienne ? C’est la question que semble ainsi soulever l’élu, pour qui l’équipe municipale s’enfonce chaque jour un peu plus dans la transgression antidémocratique.

Le recours a été déposé vendredi 26 Mai 2023 auprès du tribunal du contentieux de Lille. D’après l’élu, son dossier risque d’attendre deux à trois ans avant de pouvoir être traité.

Marine D.