
C’est à la salle de la Faïencerie, à Boulogne-sur-Mer, ce mercredi 1er octobre, que Mr Antoine Golliot a déclaré officiellement sa candidature pour le mandat de maire. À plusieurs titres, cette candidature n’est pas une candidature comme les autres. Il est le premier à se lancer dans la course, il est député depuis mars dernier, conseiller municipal, et c’est déjà la troisième fois (après 2010 et 2020) qu’il tente de ravir la mairie à Frédéric Cuvillier, maire depuis plus de 20 ans.
Enfin, Mr Golliot porte l’étiquette du Rassemblement national.
Et c’est bien pour cette couleur politique que des jeunes militants communistes ont décidé d’être présents ce soir là, devant la salle. Ils n’étaient pas une dizaine, mais leur présence, symbolique, était volontairement visible.
« Honnêtement, on avait peur d’une marée humaine, d’un engouement autour de sa candidature. En réalité, ils étaient à peine une centaine, surtout des retraités. Les jeunes se comptaient sur les doigts d’une main. Ça rassure un peu. Nous, on a choisi de rester dehors avec des pancartes », raconte un jeune militant. Une présence modeste, mais qui a suffi pour attirer immédiatement l’attention. « À peine arrivés, tout l’état-major du RN est sorti, paniqué. Ils ont commencé à nous prendre en photo, les flics sont arrivés en renfort. »
L’insulte raciste qui en dit long
Puis l’ambiance s’est brutalement durcie. « Parmi nous, deux camarades sont racisés. Il n’a fallu que ça pour que les insultes tombent. “Bougnoule !” Voilà ce qu’on a entendu. »
L’insulte, filmée, ne laisse pas de doute sur le climat dans ce type de meeting. « On a demandé à la personne de s’expliquer, mais le ton est monté. Intimidations, provocations, tout s’est enchaîné. »

Même la presse locale, pourtant venue simplement couvrir l’événement, a été prise à partie. Un sympathisant RN n’a pas supporté d’être filmé et s’en est pris au journaliste. « Leur masque tombe très vite. Cette insulte raciste, et cette manière de s’attaquer aux journalistes, ça dit tout de ce qu’ils sont », conclue un jeune militant.
Pour ces jeunes sympathisants de la gauche, être présents dès ce premier meeting était essentiel.
« Boulogne est une ville antiraciste. Les jeunes ne veulent pas d’une mairie RN, synonyme de coupes budgétaires dans la culture, dans l’éducation, et de répression contre les migrants. Avec Cuvillier, on peut au moins discuter : gratuité des manuels scolaires, réflexion sur la gratuité des transports… Ce sont des choix politiques qui comptent. Avec le RN, tout cela disparaîtrait. »
Mais derrière l’affrontement annoncé aux municipales, c’est en réalité la CAB, la Communauté d’agglomération du Boulonnais, qui concentre les convoitises. « C’est là que se jouent les arbitrages sur le logement, la culture, le développement économique, l’accueil des exilés » . En 2020 déjà, la gauche s’était présentée éclatée en plusieurs listes — socialistes, communistes, insoumis, écologistes — fragilisant ses chances d’alternance. Aujourd’hui, une tentative d’union se dessine, mais les tensions demeurent, chacun ayant en ligne de mire l’équilibre au sein de l’agglomération.
Derrière les municipales, c’est donc une bataille plus large qui se joue : celle de l’influence et du contrôle sur l’ensemble du Boulonnais.
Mais au fond, ce 1er octobre à la Faïencerie n’a pas seulement marqué le lancement de la campagne. Il annonce une confrontation décisive entre un projet de solidarité — autour de la jeunesse, de la culture et de l’antiracisme — et un projet de restrictions et d’exclusion, alimenté par la peur, porté par le Rassemblement National.
Laurent Prum
