Isabelle, Jeanne et Marianne sont trois militantes à Calais. Soutenues par l’AFPS de Calais, elles sont parties ensemble lundi dernier pour participer à la Marche pour Gaza, une mobilisation internationale mobilisant plus de 10 000 personnes venus de 35 pays qui visait à rejoindre Rafah à pied, depuis le désert du Sinaï, pour réclamer l’ouverture d’un corridor humanitaire vers la bande de Gaza, où l’on estime le nombre de morts à plus de 58 000 personnes.
ARRIVÉE EN ÉGYPTE : CONTRÔLES, SURVEILLANCE
Dès leur arrivée, les choses se compliquent. Jeanne, d’abord retenue à Paris à cause d’une opération, parvient à rejoindre Le Caire, mais des contrôles se multiplient dès l’aéroport. Des dizaines de manifestant·es venus d’Europe sont refoulés, arrêtés ou sommés de rebrousser chemin. Malgré cela, les trois Calaisiennes parviennent à se retrouver tard dans la nuit de mardi à mercredi, et choisissent de rester discrètes.
“On a fait les touristes : visite du quartier des mosquées et de l’Église copte. On n’a quasiment pas vu un seul Occidental, un seul touriste, c’était assez effarant.”
BLOQUÉES EN ROUTE POUR LE RASSEMBLEMENT
Vendredi matin, après avoir rejoint la délégation française, leurs téléphones sonnent : un rendez-vous est fixé à 130 kilomètres de la capitale. En chemin, leur chauffeur tente de les faire passer pour de simples touristes.
“Au premier check point, ça a marché. Au deuxième, on nous a confisqué les passeports. On est restées là, bloquées, avec d’autres. Français·es, Suisses, Canadiens, plusieurs centaines au total.”
LA MARCHE INTERDITE, LA DÉTERMINATION RESTE
La pression monte. L’objectif initial – atteindre Rafah – devient inaccessible. Après six semaines de silence, les autorités égyptiennes notifient leur refus. La zone du Sinaï est classée « rouge », toute présence y est désormais interdite.
Alors, deux choix : faire demi-tour, ou rester. Isabelle et ses camarades décident de rester. Une assemblée s’improvise. On chante, on scande des slogans.
“On est très nombreux, mais on voit bien que la presse ne relaie pas, notamment la presse en France. Et ça, c’est vraiment regrettable. […] C’est le sujet aigu de la Palestine… qui est capable de faire en sorte que l’Égypte se positionne ainsi. C’est incroyable.” explique Isabelle
SITTING, RÉPRESSION ET EXFILTRATION
La foule entame un sitting. L’armée rejoint la police. L’eau est déclenchée pour disperser. Une milice, armée de matraques et de fouets, intervient. Certain·es sont tabassé·es( voir fin de la vidéo). D’autres se laissent embarquer. Isabelle, Marianne et Jeanne parviennent à s’exfiltrer grâce à un médecin suisse.
« LE MONDE ENTIER LES SOUTIENT »
Elles regagnent Le Caire. Fatiguées, secouées, mais déterminées à ne pas rentrer dans l’immédiat. Comme des milliers d’autres mobilisé·es pour Gaza, elles cherchent à dormir sur place, à poursuivre ce qui peut l’être.
La marche a été empêchée, mais elle n’a pas dit son dernier mot.
Comme l’écrit AFPS Calais, qui donne rendez-vous ce samedi à 18 heures devant la tour du Guet : « La flottille de la paix, la marche pour Gaza n’ont pas atteint leur but, mais le monde entier les soutient. »
Article de Pierre Muys.
Images d’Isabelle Boucetta-Choquet, Jeanne et Marianne Bonnet